Guinée, 05 Juin (IBC) – Selon l’ancien chef de cabinet du Ministère de l’Information et de la Communication, Elhadj Ibrahima Barry, si la loi sur la liberté de la presse était strictement et rigoureusement appliquée beaucoup de radios privées guinéennes auraient été déjà fermées, rapporte votre quotidien en ligne infosbruts.com basé en Moyenne Guinée.

Elhadj Ibrahima Barry a gravi tous les échelons au cours de sa carrière professionnelle. Du simple stagiaire à La Voix de la Révolution à chef de cabinet du Ministère de l’Information et de la Communication en passant par les postes de rédacteur en chef à la radio nationale et directeur général de la Radio Rurale de Guinée.
Il a aussi été membre de la commission qui a procédé à la libéralisation des ondes en tant que représentant du Ministère de l’Information. Il était le responsable de l’équipe chargée d’attribuer les agréments.
Connaissant le contenu du cahier de charges, les règles et principes à respecter pour exploiter une radio ou télévision privée en République de Guinée, il dit avoir constaté dès les premières heures de la libération des ondes dans son pays que le péché mignon de la jeunesse se retrouvait avec beaucoup de journalistes.
« Ils ne connaissent pas les instruments de travail : le contenu de la loi sur la liberté de la presse, le contenu de la loi qui crée et fait fonctionner la Haute Autorité de la Communication (HAC), encore plus le code de déontologie » regrette-t-il.
Poursuivant, il explique que celui qui ignore ce cadre juridique de l’exercice du métier nage dans le journalisme sans faire quelque chose de professionnel. C’est pourquoi il insiste beaucoup sur la formation.

Or, les jeunes journalistes qui exercent actuellement ne bénéficient pas de cette formation reçue par les ainés, parce qu’en réalité les promoteurs des médias privés n’en font pas une priorité dans la gestion de leurs entreprises de presse.
« Ce n’est pas normale. Dans le cahier de charges, nous avons affirmé clairement que le prestataire est responsable du perfectionnement de ses agents. C’est-à-dire que le propriétaire de la radio doit faire en sorte qu’il y ait la formation continue, qu’il y ait la formation professionnelle. Même l’initiation de ceux qui ne savent rien du journalisme, parce que sans cela se sont les dérapages. Quand il y a les dérapages, on rate l’objectif que le journaliste s’est donné. Celui de faire parler les experts, les sources, les témoins, les personnes ressources. Mais, s’ils viennent en payant leur argent dans nos studios et nous nous voulons parler plus qu’eux, ce n’est pas bon. Notre rôle, c’est d’informer correctement les auditeurs afin d’en faire des citoyens qui sont capables de comprendre ce qui se passe dans l’actualité, de comprendre tous les enjeux qui sont liés à la gestion des ressources nationales, tous les enjeux qui sont liés par exemple aux questions électorales. Il faut maitriser tous ces paramètres avant de pouvoir parler de toutes ces choses là » a-t-il ajouté.
Il y aussi le fait que la plupart des promoteurs des médias privés en République de Guinée est constituée essentiellement d’opérateurs économiques et d’hommes politiques. Ce qui semble compliquer la collaboration entre les journalistes et les non-professionnels qui investissent dans le monde des médias.
« Oui ! C’est un problème qui ne devrait pas en être un. Ce n’est pas interdit à un opérateur économique de financer une radio. Seulement, quand les gens financent une radio, ils ont envie d’imposer une ligne éditoriale au médium. Cela n’est pas normal, parce que vous payez des gens pour qu’ils fassent un travail professionnel. Ce travail professionnel profite à tout le monde. Et dans ce cas, le cahier de charge vous demande vous opérateurs de veiller au perfectionnement de vos agents. Si ça ne se fait pas, alors c’est un problème. C’est pour cela que dans la plupart des radios des gens qui ne sont pas bien formés en journalisme se livrent à des choses qui ne sont pas admises. Par exemple, les gens, puisqu’ils ne connaissent pas les lois, peuvent se permettre de diffuser des trucs à tendance ethnocentrique. Cela n’est pas notre vocation. Les radios travaillent dans le sens de l’unité nationale et du développement de la citoyenneté active qui permet aux citoyens de jouer son rôle en démocratie. Cela donne aux radios un certain nombre de rôles. D’abord, on dit que la radio est témoin de la vie publique. Autrement dit, c’est elle qui suit les évènements, les rapporte, permet à la plus grande majorité de comprendre. On dit ensuite que la radio est un lieu de liberté d’expression. Autrement dit, il ne faut pas éliminer des points de vue et gardez des points de vue, parce que subjectivité n’est pas permise en démocratie. Les gens ont besoin de savoir les points de vue de chacun pour pouvoir jouer leurs rôles, notamment dans le cadre des élections ou de tout ce qui se passe dans la société. On dit après que la radio est chienne de garde, que les journalistes sont des chiens de garde face aux pouvoirs exécutif, judiciaire et le législatif. Le journaliste a le droit de poser des questions à ces gens sur des sujets qu’il a choisi. Et ces gens, généralement, répondent à ses questions » a insisté Elhadj Ibrahima Barry.
Il rassure alors qu’il faut connaitre les principes de base du journalisme pour pouvoir l’exercer de manière professionnelle.
« Lorsque vous donnez une information qui est correcte, vous avez un auditoire important parce que les gens sentent la vérité dans ce que vous dites. Et quand c’est le cas, votre auditoire augmente, votre audience aussi » a-t-il rappelé.
Parlant de la méconnaissance du code de déontologie, il regrette également le défaut de confraternité entre journalistes et le comportement de certains hommes de médias qui se livrent à des règlements de comptes.
« Dans le code de déontologie, cela est strictement interdit. C’est le point qui concerne la confraternité. Vous pouvez entendre des journalistes flinguer d’autres journalistes. Ce n’est pas permis. Mais, c’est quand un journaliste a un problème que tous les journalistes doivent se lever pour le sauver ou pour le défendre, pour faire appliquer la loi et pour veiller à ce qu’il n’y ait pas d’injustice ou de violences contre les agents de la presse. Cela constitue donc une situation qui n’est pas normale » précise-t-il.
Par ailleurs, l’ancien directeur général de la Radio Rurale de Guinée dénonce la concurrence dans le domaine de la publicité. Sur cette question notre interlocuteur indique que ce n’est pas correct qu’une radio, par exemple, se renseigne sur les tarifs appliqués par une autre radio pour ses annonceurs dans le but de proposer aux mêmes annonceurs un prix inférieur à celui fixé par le premier médium. Le faire serait de la concurrence déloyale, selon notre interlocuteur.
« Ce n’est pas permis, parce que les radios doivent fonctionner de telle sorte qu’aucune ne gêne l’autre. Elles doivent faire une compétition dans le cadre du professionnalisme, dans le cadre de l’information des citoyens.»
Actuellement des médias guinéens proposent des éditions d’informations composées essentiellement de publireportages.
« On ne peut pas mettre infiniment de publicité dans une édition d’information. Dans le cas où vous avez beaucoup de publireportages, faites-les passer de manière horaire au niveau de la station. Mais, il ne faut pas les grouper. La publicité n’est pas interdite. C’est la publicité déloyale qui crée des problèmes. Si vous respectez la loi vous ne ferez jamais de problème. Mais, seulement, il faut savoir gérer la publicité. Il y a une discipline. Et puis, elle permet à la station de fonctionner. C’est une source de financement indispensable pour les médias. Mais, il faut la faire dans les règles et conditions normales. Puisqu’il y a un problème de formation, le journaliste doit toujours remonter voir ce qu’il y a dans la loi,… » a-t-il conclu.

Il convient de signaler qu’en attendant que les patrons des médias prennent en compte la dimension formation de leurs employés, Elhadj Ibrahima Barry a publié un livre intitulé « Le professionnalisme en audiovisuel » chez Publobook en France.
Ce livre paru le 30 juillet 2020 « rappelle que les méthodes de travail de la presse restent d’actualité et peuvent aussi progresser, se perfectionner pour rendre son droit de cité à la vérité.»
Dans Le professionnalisme en audiovisuel, le doyen Elhadj Ibrahima Barry met en garde le public face aux dérives d’une société où l’information est abondante et parfois mal contrôlée, à l’instar des acteurs de réseaux sociaux qui s’improvisent journalistes, à l’origine malheureuse de simples rumeurs ou de fakes news. Un véritable plaidoyer pour la vérité médiatique et les valeurs sociales qui permet aux professionnels avérés de se perfectionner et de parfaire leur efficacité grâce à des pistes couvrant un spectre d’expériences actuelles quant aux méthodes justes, appropriées et rigoureuses dans le domaine de la communication journalistique et de l’information interactive. Une étude qui a son importance par son retentissement éthique et déontologique autant que par sa justesse d’écriture !
A noter que c’est le deuxième livre publié par le doyen Elhadj Ibrahima Barry après « L’histoire de la presse guinéenne : des origines à nos jours », parue en 2018 aux éditions Publibook.
Pour se procurer des publications de l’ancien chef de cabinet du Ministère de l’Information et de la communication, vous pouvez appeler l’auteur, Elhadj Ibrahima Barry au 666 41 03 75
Idrissa Sampiring DIALLO pour infosbruts.com
Contacts : (00224) 622 269 551 & 657 269 551 & 664 46 71 71