Guinée, 4 août (Infosbruts.com) – Pendant près de deux décennies, Cellou Dalein Diallo a incarné l’espoir politique du Fouta. Symbole d’opposition farouche aux pouvoirs successifs, il a su fédérer une base électorale fidèle, portée par un discours de résistance et une stratégie de boycott assumée. Mais aujourd’hui, ce modèle montre ses limites, alors que la région amorce une transition générationnelle et politique.

Le Fouta évolue. Ses réalités changent. Et face à ces mutations, le leader de l’UFDG semble figé, incapable de se réinventer.
Un leadership à bout de souffle
La figure de Cellou Dalein conserve encore une aura affective, mais elle ne mobilise plus comme avant. Depuis 2010, après trois échecs électoraux et une mise à l’écart durable du processus institutionnel, son discours peine à convaincre une population de plus en plus jeune et connectée, en quête de solutions concrètes plutôt que de promesses de rupture.
L’opposition systématique à l’État, la rhétorique fondée sur la victimisation et l’exclusion politique, ne produisent plus l’adhésion d’antan. Dans une Guinée où plus de 60 % des citoyens ont moins de 25 ans, le rejet de l’ordre établi ne suffit plus : il faut proposer, construire, participer.
Cette lassitude se manifeste sur le terrain. Malgré l’appel au boycott de l’UFDG, de nombreux jeunes du Fouta ont participé activement aux campagnes de vulgarisation du projet de nouvelle Constitution. Un geste révélateur d’un changement d’attitude : l’implication plutôt que l’abstention.
Cellou Baldé : le visage d’une transition assumée
Dans ce contexte d’essoufflement de l’opposition traditionnelle, Cellou Baldé émerge comme un acteur politique crédible et en phase avec son temps. Ancien député, ex-prisonnier politique et désormais ministre de la Jeunesse, il incarne une nouvelle génération d’hommes publics soucieux d’agir de l’intérieur du système pour produire des résultats tangibles.
Contrairement à Cellou Dalein, Cellou Baldé n’a pas choisi la posture de la résistance passive. Il s’attaque, avec pragmatisme, aux problématiques concrètes : éducation, emploi, formation, autonomisation des jeunes. Là où certains crient à la compromission, d’autres saluent une approche réaliste et constructive. Lui ne promet pas la rupture ; il la met en œuvre, étape par étape.
Deux visions, deux époques
La différence entre les deux leaders ne se résume pas à une question de génération, mais de logique politique.
Cellou Dalein s’accroche à un modèle basé sur la contestation. Un modèle qui, en dépit de la sympathie populaire, n’a jamais débouché sur une prise de pouvoir réelle. En verrouillant son parti autour de sa personne, il empêche le renouvellement des élites foutaniennes et bloque toute dynamique de transmission.
Cellou Baldé, lui, privilégie l’efficacité à l’incantation. Il comprend que dans un pays aux institutions fragiles, l’opposition frontale peut mener à l’impasse. Il choisit l’action publique et institutionnelle, avec une volonté affirmée d’impacter le réel.
Une rupture nécessaire pour aller de l’avant
Les signaux sont clairs :
• Les jeunes du Fouta veulent être acteurs, pas spectateurs.
• La diaspora attend des projets structurants, pas des slogans identitaires.
• Et même au sein de l’UFDG, des voix s’élèvent pour exiger un aggiornamento politique.
Face à cela, Cellou Dalein paraît davantage préoccupé par la conservation de son image que par l’évolution de son discours. Il semble miser sur l’usure du régime en place plutôt que sur une refondation stratégique.
À l’inverse, Cellou Baldé avance. Sans renier son passé d’opposant, il participe à la redéfinition de l’action politique au Fouta. Discrètement, mais sûrement.
Entre héritage et renouveau
Le mérite de Cellou Dalein n’est pas en cause : il a marqué son époque, structuré une opposition, défendu des principes. Mais le temps a passé, et avec lui, les attentes d’un Fouta en quête de perspectives nouvelles.
La grandeur politique ne se mesure pas à la longévité dans l’opposition, mais à la capacité de passer le relais, de renouveler les idées et de céder la place quand le cycle est terminé.
Aujourd’hui, le Fouta ne cherche plus un homme providentiel. Il veut une stratégie, des résultats, une relève crédible.
Cellou Baldé ne revendique pas la rupture : il la représente.
Chérif Sampiring Diallo
« Écrire, c’est parfois dire ce que beaucoup pensent tout bas. » — Infosbruts.com